Récits croisés de la journée d’action du 19 mars

Après l’acte 18 à Paris qui arrive au bout de 4 mois de lutte, les centrales syndicales posent leur deuxième date de mobilisation, suite au 5 février, ce sera le 19 mars ! Les gilets jaunes, forts de leur mouvement qui ne faiblit pas, reprennent à leur compte cette date pour inviter les grévistes à les rejoindre sur des points de blocage tout au long de cette journée de mobilisation. Car, si pour certain la grève consiste en une procession en ville sur le thème de la grève, pour d’autres, la grève est nécessairement active : Grève, Blocage, Manif Sauvage !

1er round : Le dépôt de carburant de Vern-sur-Seiche
Dans la nuit du lundi 18 au mardi 19 mars, répondant à l’appel national de blocage des raffineries et des dépôts pétroliers, une trentaine de GJ se retrouvent à 3h du matin, munis de palettes, de pneus et d’une grande détermination pour bloquer l’entrée et la sortie du dépôt. Malgré l’arrivée des gendarmes, les premiers camions citernes sont bloqués dès 4h15 et nous allons à la rencontre des chauffeurs pour leur expliquer la situation et boire un café. A 5h, c’est maintenant une dizaine de camion qui sont bloqués, on apprend que le blocage de Donges a été viré mais que les camarades continuent de bloquer les rond-points autour. Voyant que plus d’une trentaine de camion citernes sont à l’arrêt au bord de la route et notre nombre diminuer en même temps que celui des flics augmente, nous décidons de lever le camp pendant que les indésirables galèrent à dégager nos barricades…

La journée ne fait que commencer !Round 2: Manif
Dans les derniers mouvements à Rennes, la constitution d’un cortège intersectoriel qui prend la tête de la manifestation est devenu une habitude à chaque journée de mobilisation. Cette espace rassemble tous les gens en lutte, à la fois ceux qui ne se reconnaissent pas dans le cadre proposé par les centrales syndicales et ceux que ces dernières ne défendent quasiment jamais ; les précaires, les chômeurs, les étudiants travailleurs ou non… Cette auto-organisation permet à tous ceux qui veulent briser le corporatisme et participer à la grève de manière active de s’organiser sans chef ni hiérarchie et s’opposer à ceux qui veulent encadrer les mobilisations et faire le taf d’auxiliaires de police par des services d’ordre.

12 mai 2016 à Marseille : La CGT attaque et gaze les manifestant-e-s en fin de cortège.

Pour une fois, le SO de l’intersyndicale compte dans ces rangs 80 personnes de la CGT, FO mais surtout Solidaires 35, postés à l’avant du cortège mené par la CGT. Ces derniers, encadrent la manif en lien avec les forces de l’ordre, afin d’empêcher l’émergence de toute initiative qui mettrait en péril leur ballade mensuelle et surtout éviter d’entrer en résonance avec le mouvement des gilets jaunes qui exalte la contestation sociale depuis plusieurs mois.

Dès l’arrivée du cortège à République, une des banderoles des gilets jaunes se fait attaquer et voler par les flics, sans la moindre réaction du SO et des syndicalistes qui sont favorables à son existence. Seulement, l’injonction aux syndiqués de base à bien rester dans le rang des centrales et de leur bureaucratie départementale est régulièrement débordé ; c’est donc pour ces raison plus qu’évidentes, que des personnes en luttes syndiquées ou non, ont donc pris l’initiative de reprendre l’avant du cortège, sans banderole mais motivés. Tout le reste de la manif, le SO essaiera en vain de dégager ceux qui les débordent afin d’endiguer la fuite de syndicalistes de leurs rangs, et ce, au corps à corps. Les chants et moqueries redoublent au vu de leur entêtement et la solidarité permet de désamorcer ce dispositif constitué de marmules en chasubles qui s’amuse à foutre des mains au cul au passage.
Tout le monde est désormais prévenu : on n’empêchera pas la jonction de tous ceux qui veulent se retrouver, s’organiser, se tenir collectivement dans la rue, bloquer l’économie, chanter notre rage, faire chier les capitalistes, bref, repeindre d’un jaune éclatant ces cortèges qui puent la défaite…

Car l’histoire aura raison de ceux qui négocient les conditions de notre exploitation.
Nous sommes de ceux qui mettent en acte la solidarité et niquent la dissociation, la coupe est pleine, DEBORDONS !

3ème round: Blocage de la Plateforme Industrielle Cedex (PIC)
On se retrouve le soir, à la maison des gilet jaune à St Grégoire, lieu fixé du dernier départ en action. C’est aussi le moment de l’assemblée hebdomadaire des gilets jaunes à Rennes et alentours. Nous prenons donc un temps pour discuter et savoir si nous ferons cette AG sur le point de blocage ou ici avant de partir en action. Finalement nous décidons de reculer le départ en action pour prendre le temps de nous organiser pour la suite.
A 20h30, une cinquantaine de personnes se retrouvent donc à la Plateforme Industrielle Cedex (PIC) d’Armorique de Noyal-Chatillon-Sur-Seiche. Il s’agit d’une vaste usine de La Poste qui traite le courrier de tout le grand Ouest.
Une fois les barricades installées, c’est très rapidement que des dizaines de camions de toutes tailles se retrouvent bloqués. Une fois encore nous allons discuter avec eux du mouvement et des perspectives autour d’un café ou d’une clope. Nous leur conseillons d’appeler leur patrons pour leur dire qu’ils sont bloqués par des gilets jaunes, et que s’ils et elles le souhaitent nous pouvons aussi les aider à bloquer leurs boîtes pour qu’ils puissent faire grève plus facilement.
C’est justement pour faire écho à la grève que nous avions choisi cette action. En effet, un an plus tôt des dizaines de facteurs et factrices de Rennes ont fait une grève de plusieurs mois contre la réorganisation de leur bureau de poste. A cette occasion, la PIC avait été bloquée plusieurs fois.
Les travailleurs de nuit de la PIC commencent à arriver. Très nombreux sont ceux qui nous soutiennent, notre présence semble les ravir, nous leur distribuons des tracts qui rappellent comment faire grève et explique notre action, tout en leur disant, que c’est ensemble que nous serons plus fort et que si les flics viennent nous dégager, les travailleurs et travailleuses à l’intérieur de l’usine peuvent prendre le relais en faisant grève à leur tour!
Les flics sont de plus en plus nombreux, et font déplacer les camions. Nous comprenons qu’ils sont en train de dégager l’accès pour pouvoir intervenir…
On commence à se rassembler pour prendre une décision, la barricade s’enflamme et nous décidons de partir à travers champs. Les gendarmes nous chargent sur plusieurs centaines de mètres le long de la rocade plongée dans le noir. Tout le monde court se réfugier dans un resto ouvrier encore ouvert, où les flics n’hésitent pas à entrer en force et gazer. Après quelques minutes pour tenter de reprendre notre souffle, nous décidons rapidement de donner la même identité ; Camille Dupond, ils nous font sortir manu militari un par un, et contrôlent l’identité de tout le monde, 5 camarades sont choisis au hasard et se font embarquer à la gendarmerie de Vern. On fait un débrief et on organise le soutien à ceux embarqués. Ils ressortiront dans la nuit et le lendemain avec une convocation ou un rappel à la loi, pour certains au nom de Camille Dupond.
Pour contrer la répression mais surtout pouvoir envisager et organiser plein d’autres actions et former un cortège ouvert et bouillonnant, nous avons besoin d’être toujours plus nombreux.ses, ne passons pas à côté de la possibilité de gagner !